"Pas Le Pen, Môôônsieur Le Pen"
Hier soir avec Mon Maître, on s'est fait une petite soirée télé, peinard, confortablement installé, lui dans son petit fauteuil Napoléon III, moi dans ma petite corbeille Baltique Ier. La soirée avait bien commencé jusqu'au générique de l'émission à laquelle Mon Maître participa la semaine dernière, vous savez "qui veut m'élire Président ?". Cette émission me plait, la soirée s'annonçait bien. Je me disais qu'on allait bien se marrer comme on se marre à chaque fois qu'un autre candidat ouvre la bouche. Tout excité, je m'écriai : "ça va être drôle Maître, ce soir l'invité c'est Le Pen", "pas Le Pen, MÔÔÔNSIEUR Le Pen chienchien" corrigea Mon Maître excédé. C'est à ce moment-là que je compris qu'on allait moins rire que dimanche devant le discours grotesque de Ségolène, tant pis je me marerai une autre fois. Mais si je n'ai pas ri, j'ai au moins appris un truc hier soir : Mon Maître ne supporte pas qu'on se moque de Môôônsieur Le Pen, il a beaucoup d'estime pour Môôônsieur Le Pen, etc. Il m'a même confié que, parmi ses adversaires, c'est de loin lui qu'il respecte le plus, "pour son parcours, sa carrière, son charisme, ses idées, pour son humour et ses jeux de mots aussi". Moi j'ai bien fait comprendre à Mon Maître que je ne l'aime pas trop son Môôônsieur Le Pen, que c'est un de ses adversaires et que, par principe, je n'aime aucun de ses adversaires, pas plus Môôônsieur Le Pen qu'un autre, que c'est comme ça. Pour tout dire, au cours de la soirée, Mon Maître m'a vraiment fait peur en ne tarissant pas d'éloges sur Môôônsieur Le Pen, il disait : "que c'est parce que je ne le connais pas, que je ne l'aime pas", "que si je le connaissais, je trouverais moi aussi que c'est quelqu'un d'exceptionnel", "qu'il fallait le voir avec son bandeau quand il était jeune, il en imposait", "que c'est quelqu'un cet homme", "que lui au moins c'est pas un pédé", "que c'est un exemple à suivre", "que c'est le grand père qu'il a toujours rêvé d'avoir", "que malgré son âge, il a encore bon pied, bon oeil", "qu'il préfère la droite décomplexée de Monsieur Le Pen à la droite des-cons-tout-court de Chirac", "que lui et moi nous sommes diabolisés par les gauchistes bien-pensants parce que nous disons la vérité". Il veut perdre ou quoi ? Mon pauvre Maître ne devrait pas vouer une telle admiration à l'un de ses adversaires, c'est la meilleure manière de se faire battre. Il est dangereux quand même son Môôônsieur Le Pen, il était au deuxième tour en 2002, c'est pas Arlette Laguiller ce type. Et puis je ne sais pas s'il a toujours bon pied bon oeil Môôônsieur Le Pen mais une chose est sûre, il a deux pieds, un oeil. Ca fait deux pieds et un oeil de trop. Moi je me mettrai à aimer Môôônsieur Le Pen quand il sera cul-de-jatte et aveugle ou mieux : quand il sera mort et six pieds sous terre, incapable de battre Mon Maître. Si c'est à ce point un exemple à suivre, qu'il y aille Mon Maître, qu'il se crève un oeil pour lui ressembler, il est devenu fou ou con ? A la fin de la soirée, il alla même jusqu'à m'avouer qu'il se prenait parfois à rêver de se retrouver avec Môôônsieur Le Pen au second tour de l'élection présidentielle. Il me dit : "je serai alors face à un dilemme, je me dirai : tu rêves de cette élection mais ton devoir est de tout faire pour qu'il devienne Président car au fond de toi tu sais bien que la meilleure chose qui puisse arriver à la France c'est lui, c'est Môôônsieur Le Pen, et puis lui il est vieux, toi tu as tout ton temps pour devenir Président : 2012, 2017, 2022, 2027, 2032, 2037, 2042, 2047 etc.". Il est devenu complètement con, je vais être obligé de changé de Maître si je veux voir l'Elysée un jour, moi je serai mort en 2047. Mais putain, il faut qu'il se ressaisisse, il faut qu'il gagne, après on verra bien. Si ça lui chante il pourra toujours nommer son cher Môôônsieur Le Pen ministre de quelque chose, je sais pas trop de quoi, il a l'air de bien maîtriser les questions de sécurité et d'immigration son Môôônsieur Le Pen, eh bien une fois Président, il pourra le nommer Ministre de l'intérieur, je suis sûr que ça pourrait être son digne successeur Place Beauvau. Mais pour l'Elysée, il faut que pour une fois les français préfèrent la copie à l'original.